Solidarité. Ce mot qualifierait parfaitement le lien qui s’est récemment noué entre le Manoir Outremont, l’Université de Montréal et deux jeu¬nes Ukrainiennes ayant fui leur pays en guerre, Maryna et Katrin. En collaborant avec l’UdeM, la résidence outremontaise pour aînés a pu offrir un appartement aux étudiantes désormais disposées à s’intégrer dans leur pays d’accueil.

Le 1er novembre dernier, le Manoir Outremont et ses résidents ont accueilli Maryna et Katrin, arrivées à Montréal en avril après avoir transité par la Pologne et la France. Les deux jeunes femmes inscrites dans un programme de premier cycle à l’Université de Montréal vivront pendant une année entière dans un appartement offert par COGIR, l’entreprise propriétaire de la bâtisse située sur l’avenue Rockland.
Une impulsion des résidents
« Quand il y a eu la guerre en Ukraine, on s’est tous sentis concernés. En tant que croyante, je priais pour eux à la messe et on se demandait ce qu’on pouvait faire d’aussi loin », déclare Francine Sabourin, présidente du Comité des résidents du Manoir Outremont. Lorsqu’elle a entendu parler dans les médias de l’arrivée d’étudiants ukrainiens à Montréal, cette ancienne professeure a donné une première impulsion en demandant aux propriétaires du Manoir Outremont si une solution d’hébergement pouvait être envisagée pour certains d’entre eux.
« Ils ont dit oui tout de suite », s’exclame la résidente le sourire aux lèvres, visiblement enchantée de cette décision des propriétaires des lieux d’apporter leur soutien. Lorsque l’accord a été donné, elle est entrée en contact avec Marie-Ève Ouellet du vice-rectorat de l’Université de Montréal afin de mettre en place une entente et proposer cette option de logement aux étudiants intéressés.
Geneviève O’Meara, porte-parole de l’Université de Montréal, raconte qu’en plus d’avoir participé activement au bon déroulement du transfert d’étudiants entre l’Ukraine et le Canada, l’Université de Montréal a créé et utilisé le Fonds d’aide aux communautés universitaires en situation de crise humanitaire pour soutenir notamment les membres de la communauté affectés par la guerre en Ukraine. L’offre d’hébergement du Manoir Outremont vient s’ajouter à cette mobilisation.
Se créer un chez-soi
Maryna et Katrin se sont vues proposer un appartement d’une chambre qu’elles ont accepté et aménagé en partie grâce à l’aide des résidents.
« Les deux étudiantes ont eu un coup de cœur », explique Geneviève O’Meara. « Elles se sont très bien organisées, elles se sont faites un chez-soi qui est agréable », ajoute Francine Sabourin qui a formé un comité de quatre résidents afin d’accueillir les nouvelles arrivantes et fournir meubles et autres équipements nécessaires à leur installation.
« Nous n’avons besoin de rien, nous avons tout, ils nous ont acheté absolument tout, même des casseroles. Quand nous sommes arrivées, ils nous ont offert des fleurs, j’étais très heureuse », raconte Maryna. « L’université m’a donné l’essentiel, un logement gratuit pour le début de mon parcours et un bon environnement. Je me sens heureuse ici, sauf le fait que je suis loin de ma famille et mes meilleurs amis », confie-t-elle. Âgée de 18 ans, l’étudiante n’a pas le temps de s’ennuyer. Elle suit un programme en communication politique, travaille en tant que gestionnaire des médias sociaux pour l’UdeM et comme auxiliaire d’enseignement à l’UQAM.
Un partage intergénérationnel
Francine Sabourin et les autres résidents souhaitent se montrer accueillants sans s’imposer auprès de Maryna et Katrin. Ils sont environ 260 résidents à vivre au Manoir Outremont, et certains sont en situation de perte cognitive ou physique. La présidente du comité voit en cette expérience l’occasion de tester les bienfaits d’une cohabitation intergénérationnelle. « Parce que c’est quand même spécial d’avoir des jeunes dans notre maison », renchérit-elle. L’université s’est également assurée que les étudiantes se sentent à l’aise dans cet environnement méconnu. « Ce genre de résidence n’existe pas vraiment en Ukraine, on voulait être certains que si elles acceptaient l’offre, elles sachent dans quoi elles s’embarquaient », rapporte la porte-parole Geneviève O’Meara.
Maryna raconte avoir d’agréables échanges avec les résidents. « Je pense que c’est une expérience unique. Ils ont beaucoup d’expérience et donnent souvent des conseils intéressants ou parlent des traditions québécoises. L’un d’eux apprend parfois de nouveaux mots ukrainiens pour parler ukrainien avec nous. C’est très mignon! », confie-t-elle avant d’ajouter qu’elle et Katrin ont désormais « beaucoup de grands-mères ».
« On a trois ou quatre anciens professeurs de l’Université de Montréal qui sont ici, ils sont allumés et capables de leur enseigner le français », assure Francine Sabourin, convaincue que les résidents pourront mettre à profit leurs compétences pédagogiques afin d’aider Maryna et Katrin à améliorer leur maîtrise de la langue d’ici.