PHOTOS LE JOURNAL D’OUTREMONT
À l’ombre de l’église Saint-Viateur, dans l’ancien presbytère attenant, se trouve un espace unique où la mort est loin d’être tabou. Au contraire, ici, à la Maison Monbourquette, les langues se délient. Et ce qui importe: prendre le temps de vivre son deuil. L’organisme sans but lucratif (OSBL), fondé en 2004, a pignon sur rue à Outremont depuis dix ans, et offre un soutien gratuit à une centaine d’endeuillés chaque semaine.
La Maison Monbourquette, c’est la poursuite de l’oeuvre de Jean Monbourquette, un prêtre, psychologue et humaniste décédé en 2011, que la fondatrice de l’organisme, Lisette Jean, appelle ni plus ni moins, « le père du deuil ».
Lisette Jean est d’abord une femme d’affaires. Son projet de la Maison Monbourquette lui est venu à la suite du deuil de sa mère il y a quelques années. « Je savais que j’avais mal à l’intérieur et que j’avais besoin de guérir », raconte-t-elle.
À la lecture du livre Grandir: aimer, perdre et grandir, un des best-seller traduit dans plusieurs langues de Jean Monbourquette, elle a décidé de prendre contact avec lui. « Il m’a invitée au premier groupe de soutien de personnes endeuillées au Centre St-Pierre, rue Panet. Moi je lui avais dit: Jean, lorsque je vais arrêter de travailler, je vais ouvrir une maison en ton nom. »
Ils sont quelque 80 bénévoles aujourd’hui à faire rouler l’organisme. L’approche de Jean Monbourquette utilisée par les intervenants qui y travaillent est non-confessionnelle. La démarche allie à la fois la psychologie et le spirituel. Dans la finition du processus du deuil, on parle entre autres de la quête de sens relié à la perte de l’être cher, du pardon et de l’héritage spirituel du défunt.
Une écoute active
En 13 ans, l’organisme communautaire a déménagé trois fois de locaux, passant du boulevard Saint-Joseph (à l’angle de Papineau) à l’avenue De l’Épée, jusqu’ici, avenue Bloomfield. Un lieu calme, apaisant…dont plusieurs disent en ressortir serein.
C’est à cette adresse que se trouve la ligne d’écoute sans frais, 1-888-LE DEUIL (533 3845), joignable depuis tout le Canada. Une ligne personnalisée, qui a répondu à pas moins de 2600 appels en 2016.
« C’est Jean qui a commencé à former les premiers bénévoles de ce service », indique la fondatrice, soulignant au passage que Lucille Joly, l’une des premières à avoir été formées est toujours ici.
Sous ce même toit, se déroulent également les rencontres individuelles; les séances de musicothérapie lorsque les mots de suffisent pas, ainsi que les groupes de soutien. Un pour les jeunes et les familles, un autre mixte, et un autre encore pour les hommes seulement. « En parler pour mieux le vivre», et « Pour que la vie reprenne son envol » sont par ailleurs les deux devises de l’organisme.
Un langage qui a changé
En 2010, la Maison Monbourquette a ouvert un centre de formation ayant pour objectif « de pouvoir partager notre expertise et de former des professionnels pour qu’à leur tour ils puissent aider des endeuillés où qu'ils soient », intervient Sophie Simonet, responsable du financement philanthropique à la Fondation Monbourquette.
Avec leur porte-parole, l’auteure et conférencière Dominique Bertrand, ils outillent des gens de tous les milieux. « On travaille avec les gens du réseau de la santé, la police, les centres d'aide aux victimes d'actes criminels (CAVAC), les thanatologues, le Dr Marsolais pour les dons d’organes…», soulève Lisette Jean.
En 2016, il y a eu 63 600 décès au Québec, selon l’Institut de la statistique du Québec. « Oui, et on constate que la demande est de plus en plus grande. Et qu’il y a un langage qui a changé aussi. Dans les médias aujourd’hui, on va dire: les gens veulent vivre leur deuil, une chose qu’on avait peur de dire auparavant. »
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